Une sonnerie de téléphone résonnait pour la troisième fois dans le salon de la Tour. Signe que l'interlocuteur insistait vraiment pour déranger ses habitants ; également que personne ne semblait disposer à répondre.
« Il faut que je décroche, » s'alarma Pepper en entrant dans la pièce en coup de vent.
Elle regarda autour d'elle, cherchant où poser Morgan. Si Loki avait vu la scène il aurait surement pointé le sol d'un index dédaigneux, c'était tout ce que cet enfant méritait. Pepper, par le plus grand des hasards, ne trouva justement que Loki dans le salon. Il était plongé dans une profonde réflexion face à un tableau accroché au mur.
Le dieu ne comprenait rien à l'art moderne. Qu'est-ce que ce tableau était censé représenter ? Est-ce que ça représentait seulement quelque chose ? La seule chose que cette "œuvre" inspirait à Loki était une horreur sans fond. Et une grande souffrance. Pas une souffrance interne devant un sentiment que l'artiste avait tenté d'exprimer, quelque chose qui prenait aux tripes. Non. Il avait littéralement mal. C'était une souffrance physique, il avait l'impression que ses yeux brûlaient à force de regarder cette chose. Et pourtant, impossible de décrocher le regard ? Quelle était cette malédiction ? Loki était si perdu qu'on aurait presque pu voir des points d'interrogation voler autour de lui.
Pepper s'approcha du brun qui fut brusquement arraché à l'abomination du mur — qu'il se promit de détruire le plus vite possible, mettant à feu et à sang le salon entier au passage — et lui mit sa fille dans les bras.
« Qu'est-ce... Ah ! L'enfant ! glapit le Jotun en sentant un désagréable frisson lui traverser l'échine devant cette effroyable représentante de l'espèce humaine.
- Ça ne sera pas long, » promit Pepper en s'éloignant pour trouver le téléphone qui sonnait toujours.
C'était un téléphone vraiment persévérant et c'était tout à son honneur.
Par contre Clint n'appréciait pas du tout être dérangé pendant qu'il se faisait un sandwich. Dès la première sonnerie, l'archer avait expédié le téléphone dans le couloir en supposant que quelqu'un daignerait répondre. Ce quelqu'un fut donc Pepper qui décrocha quelques quatre sonneries plus tard.
En attendant, puisque tout le monde préfère savoir ce que fait Clint avec son sandwich et pourquoi il déteste être dérangé plutôt que découvrir qui téléphonait avec tant d'acharnement à la Tour, ou même de savoir comment s'en sort Loki avec un enfant dans les bras, restons avec l'agent Barton.
Ainsi, Clint désirait une ambiance calme et non perturbée par des sonneries intempestives parce qu'il risquait d'être déconcentré pendant sa création. Là, vous vous demandez peut être quel genre de sandwich nécessite autant d'attention ? Aucun en particulier. Il fallait juste savoir que si un humain normalement constitué assemblait son sandwich posément avec ses mains, tout ceci était bien trop « classique » pour l'archer. Mister Barton faisait toujours ses sandwichs de la même façon : tête dans le frigo, assiette posée sur le bar derrière lui et aliments lancés par-dessus son épaule.
Peut être comprenez-vous maintenant le problème d'un téléphone trop insistant.
Une tranche de jambon lancée en l'air risquait alors d'atterrir sur le sandwich en construction mais — sacrilège ! — sans être parfaitement bien positionnée. Et tout bon créateur de sandwich savait qu'il était dès lors impossible de bien aligner les tomates ou le concombre.
Ce coup de téléphone avait entrainé ce problème insurmontable très précis.
Avec un regard attristé devant le désastre de ce merveilleux sandwich qui aurait dû être parfait en tout point mais qui — merci téléphone — souffrait d'un infime décalage, Clint mordit dedans. Au moins le goût était là. Un triste sourire aux lèvres, l'agent poursuivit son repas.
Refermons cette parenthèse sandwich bien trop conséquente et retrouvons Loki qui, rappelons-le, suivait Pepper du regard pendant qu'elle quittait la pièce pour décrocher.
Loki baissa les yeux vers Morgan. Il lui adressa tout d'abord un regard sinistre en la gardant à bout de bras. Cependant, à sa plus grande surprise, elle éclata de rire.
Loki fléchit légèrement ses bras, rapprochant l'étrange petite mortelle de lui. Petite mortelle qui pencha la tête sur le côté en lui souriant. Le cœur du géant de glace s'adoucit brusquement. Cet enfant était un ange. Un ange sur Terre. Rien à voir avec les bambins braillard d'Asgard, piaillant à qui mieux mieux chez les filles et voulant jouer les guerriers alors qu'ils ne tenaient pas encore debout chez les garçons. Les pires de tous étaient sans hésitation les filles qui prenaient les armes. Un mélange des deux ? Brr terrifiant.
Durant les trois petites minutes pendant lesquelles Pepper coupa court à sa conversation téléphonique, dans le salon Loki et Morgan se regardaient dans le blanc des yeux. Etincelle de joie chez Morgan, étrange fascination chez Loki.
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Téléphone déposé et attention de nouveau concentrée sur sa fille, Pepper retourna dans le salon.
« Je peux récupérer Morgan si tu veux. »
Loki prit l'enfant contre son torse en regardant froidement la mère.
« Ça ne fait que cinq minutes que j'ai cet enfant dans les bras mais si quelque chose lui arrive je tuerais tout le monde dans cette Tour et ensuite je me suiciderais, » prévint Loki avec un regard on ne peut plus sérieux.
Pepper cligna des yeux sans rien dire, perdue devant la réaction — légèrement excessive dirons-nous — du Jotun.
« Je... Il ne lui arrivera rien, tu peux en être certain. Avec autant de supers héros à proximité elle est en sécurité. »
Puis, elle récupéra prudemment sa fille. Devait-elle parler à Tony de cet étrange changement chez le Jotun ? Pour protéger le cœur du génie d'une crise cardiaque, très certainement. Il faudrait juste qu'elle trouve les bons mots et le bon moment.
Toujours est-il qu'aussi étrange que celui puisse paraître — et de fait, ça l'était — le Jotun devint rapidement le baby-sitter de référence pour la jeune princesse de la Tour Avengers. C'est donc à lui qu'il incombait, pendant les heures ou Pepper et Tony travaillaient, de gérer les demandes de la miss.
Le dieu sachant tenir tête à des soldats asgardien qui s'emballaient pendant leurs entraînements et depuis peu à des employés qui voulaient avoir des primes toutes les deux semaines, un enfant ne lui poserait jamais problème. Il lui suffisait de dire non. Et Loki savait dire non. Il était un spécialiste en la matière.
« Loki, arrête de poignarder ton frère pour jouer. »
Non.
« Loki, reste bien tranquillement sur Asgard et ne va pas semer la panique et la destruction dans les autres royaumes. »
Non.
« Loki, arrête de te faire passer pour mort. »
Non. C'était bien trop amusant.
« Loki, arrête de vendre ces satanés chaussures volantes dans toute la ville. »
Bien évidemment, non.
Il n'avait pas peur de dire non. Mais Loki n'avait jamais eu à lutter contre un enfant, bien plus tenace que des adultes sur certains points. C'est pourquoi il disait « non » en boucle depuis une heure environ.
« Zoo !
- Non.
- Zoo, » insista Morgan en fronçant les sourcils sur une moue boudeuse.
Loki la regarda froidement, d'un regard glacial qu'il utilisait couramment pour calmer ses employés quand leurs débats sur les chaussettes* s'envenimaient, mais elle semblait y être immunisée.
« Zoo, » répéta une énième fois — Loki avait perdu le compte il y a bien longtemps — Morgan en prenant un air cette fois-ci menaçant.
Eh, c'est pas la fille de Tony pour rien, elle a du caractère la puce.
Loki haussa un sourcil et sourit légèrement. Il s'en rendit compte aussitôt et déchanta très vite. Il avait sourit. Autrement dit, il avait perdu ; conclusion, elle avait gagné.
« ... Bon d'accord, céda l'asgardien. On va au zoo. »
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Loki découvrit en cette merveilleuse et ensoleillée journée qu'une journée merveilleusement bien ensoleillé n'était pas le moment idéal pour aller au zoo. Des enfants. Partout des enfants. Et les parents qui allaient avec. Et des ados, à deux doigts de pleurer devant des loutres qui se tenaient par la patte. Loki fit un détour prudent pour éviter ces étranges spécimens. Et encore des enfants.
Si ça n'avait tenu qu'à lui, Loki aurait tout simplement ordonné la destruction du lieu tout entier mais... Devant lui, avançant d'un pas encore hésitant mais pourtant rempli de détermination, Morgan. Morgan qui riait devant une volière remplie d'oiseaux aux plumages exotiques. Elle était adorable.
« Elle est adorable, souffla une voix de femme près de Loki qui sursauta. Ah les enfants, je me rappelle quand les miens avaient son âge... Quand ils commencent à parler c'est tellement mignon ! »
Loki tourna la tête à droite puis à gauche. Cette femme n'était quand même pas en train de lui parler à lui ?
« Elle est à vous ? Elle ne vous ressemble pas vraiment. »
Loki lui offrit un grand sourire et un serpentin vert s'enroula autour de lui. L'instant d'après, c'était Tony Stark qui souriait à la femme.
« Papa, » reconnu Morgan avant de pointer le secteur des reptiles du doigt.
Elle en avait assez des oiseaux, il était temps d'aller explorer une nouvelle zone du zoo. Loki se retransforma et souleva Morgan dans ses bras avant de partir, sans un regard pour la femme hébétée qui restait immobile au milieu de l'allée. Elle avait bien vu Tony Stark à l'instant. LE Tony Stark. Iron Man en personne. Elle n'avait pas rêvée, n'est-ce pas ?
Le dieu reposa Morgan au sol quand ils furent arrivés devant les vivariums. En voyant les nombreux serpents se prélasser sous leurs lampes UV, Loki se demanda si ce zoo ne manquait pas drastiquement de spectacles. Il répondit à son interrogation dans la foulée. Si, il en manquait. Loki n'en avait compté que quatre notable.
1- Le spectacle des otaries, qu'il avait évité car on y retrouvait les mêmes adolescents que chez les loutres mais qui s'extasiaient cette fois devant les démarches et glissades des otaries.
2- Le spectacle des perroquets et autres bestioles volantes, il trouvait ça ridicule.
3- Le nourrissage des pingouins, Loki trouvait les pingouins très drôle mais ces maudits adolescents avaient fait leur grand retour en voulant libérer un groupe de quatre pingouins, soit disant qu'un lion avait besoin d'eux ? Aberrant. « Cours Kowalski ! » avait même crié un des fous furieux en portant à bout de bras un des pingouins.
La police était intervenue, ainsi que le SWAT, le SHIELD avait évacué les pingouins (qui vivent encore aujourd'hui sur l'héliporteur, l'agent Coulson leur fournit tous les jours un uniforme parfaitement repassé estampillé du logo du SHIELD*²) pour leur propre sécurité.
Alors que les pingouins volaient aux côtés de l'agent Hill pour gagner ce qui deviendrait leur nouvelle maison, le président des États-Unis avait débarqué en hélicoptère — tout juste revenu d'un voyage d'affaires dans les îles — pour surveiller la scène.
Ah et accessoirement un ours avait réussi à quitter son enclos pour semer la terreur entre la zone des caribous et le stand de crêpes (le miel faisant parti des nappages disponible) enfin bref une sale histoire...
Que Loki avait regardé de loin en léchant un esquimau. Il s'était bien amusé et pour une fois n'était aucunement responsable du moindre évènement, il était trop occupé à faire manger son yaourt à Morgan quand la guerre avait débuté.
4- Le nourrissage des fauves ou des gros mammifères, et là encore Loki avait fait l'impasse, il s'attendait à ce qu'un membre du public soit désigné pour être jeté dans la fosse aux lions ou entre les pattes d'un ours polaire. Ça aurait pimenté l'animation d'une manière assez unique et c'est ce genre d'attraction qu'on attendait quand on avait grandit sur Asgard.
Finalement après une journée riche en émotions pour le public humain et tout à fait passable pour le dieu, Morgan fut remise dans le harnais ventral que portait Loki et les deux décolèrent ainsi devant l'entrée du zoo, direction la Tour. Dans son sillage, Loki laissa des prospectus pour ses chaussures tomber négligemment sur la tête des passants. Il n'y avait pas de mauvaise publicité pour sa boîte.
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Selon les dires de Loki, c'est une journée sans encombre qui s'acheva plus tard devant la télévision.
Maintenant, si vous le voulez bien, revenons un peu en arrière. Revenons au moment où Loki avait cédé à la demande de Morgan.
Vous pensiez vraiment que notre cher Iron Man allait laisser sa fille découvrir le zoo juste en présence de Loki ? Soyez sérieux, si Loki servait de baby-sitter jusque là c'est parce que sa fille adorée était bien au chaud dans la Tour. Protégée de tous les côtés par moultes robots et caméras, sans oublier la présence rassurante de notre cher J.A.R.V.I.S. Mais dans ce monde extérieur si vil et dangereux ? Hors de question de la laisser entre les mains de corne de bouc. Même si Loki semblait étonnamment sincère quand il disait aimer s'occuper de Morgan.
Tony avait regardé sur les caméras Loki descendre en bas de la Tour, harnacher sa fille et s'envoler. Pour la première fois de la journée, le génie avait frôlé la crise cardiaque — et malheureusement pour lui c'était loin d'être la dernière — et s'était précipité pour ressortir ses plans d'armure adapté à sa fille. Ça allait devenir impératif, n'en déplaise à Pepper. Bon, il garderait quand même ce projet secret, déjà qu'elle avait fait une scène pour la balise GPS, soit disant qu'il « n'est pas acceptable de s'équiper son enfant d'une balise ». Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre franchement... Et en attendant, sans cette balise, sa fille aurait pu périr sous les cadeaux. Ce qui aurait eu pour seul intérêt d'offrir l'un des épitaphes les plus absurdes de l'année.
Reprenant ses esprit, le génie avait fixé les plans et, prit d'un soudain mauvais pressentiment, avait sorti son armure et activé sa caméra.
« Mesdames et messieurs, annonça solennellement Tony en fermant son casque, bienvenue dans votre épisode de StarkCam, nous sommes de retour à l'antenne. »
Tony décolla et quitta la Tour des Avengers à toute allure, laissant derrière lui un Hawkeye tout penaud qui venait le chercher. Compliqué de suivre Iron Man quand on est un humain lambda armé d'un carquois et d'un arc.
« Rejoins une équipe qu'il disait... Ils seront toujours là pour toi qu'il disait...»
Clint donna un coup de pied dans un des cartons qui traînait, faisant tomber un bras d'armure taille enfant qui lui flanqua la frousse. N'écoutant que son courage, il fit un bond en arrière, tira une flèche qui se planta dans le creux du pli du coude et décampa aussi sec. Tony faisait vraiment des trucs pas nets dans ses labos, la prochaine fois Natasha irait le chercher elle-même.
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Bien loin des problèmes existentiels de l'agent Barton, Tony volait au-dessus de New-York.
« Ah elle est loin l'époque où il vivait dans la forêt avec son frère qui coupait des arbres. Ce parasite vit maintenant sous mon toit, profitant allégrement de tout le confort de ma maison. Vous imaginez ? »
Tony marmonna un instant dans sa barbe.
« Enfin assez parlé de ça, aujourd'hui StarkCam n'est pas un documentaire animalier mais une opération de surveillance. Et puis vous connaissez déjà le spécimen. C'est parti. »
Plan aérien sur New-York. On survole certains gratte-ciels et slalome entre les autres.
En plus de s'approprier mon lieu et style de vie, ce maudit Loki semble déterminer à s'emparer de mon adorable fille. Il est hors de question que cette situation s'aggrave. Je refuse d'entendre un jour un « tonton Loki est super cool ! ». C'est ma fille, il n'a qu'à avoir des enfants au lieu de piquer ceux des autres.
Cut. On distingue le parking et les portes d'un zoo en contrebas.
Bien, nous sommes sur place, reste à trouver notre cible. L'avantage du Loki c'est que la discrétion est loin d'être sa spécialité, contrairement à votre serviteur bien sûr. Ah tiens il est… Il a prit mon apparence ? Cette fois c'est décidé je vais… Morgan ! Non ! Pas vers les serpents ! Argh ! Mon cœur lâche. Adieu monde cruel…
Nous interrompons notre programme pour une pause nécessaire au bien être de notre envoyé spécial qui se remet d'une petite crise cardiaque.
Je suis de retour. J'ai acheté des donuts. J'avais besoin de sucre. Nous pouvons reprendre. Après avoir insolemment mis la vie de ma fille en danger en l'amenant voir ces maudites créatures que sont les serpents, le Loki réalise enfin, avec un retard révoltant, que c'est l'heure du goûter.
Cut. Loki accroupit devant Morgan lui fait manger un yaourt.
Regardez-le jouer le papa modèle… On pourrait croire qu'il a de l'expérience.
Cut. Au loin, un petit groupe d'adolescent court vers la zone des pingouins.
Ça part exemple, des adolescentus débilus. Enfin retournons à notre mission. Morgan a l'air heureuse, tant mieux pour l'espérance de vie du néogothique. Si on enlève l'incident serpent et le retard du goûter ça se passe mieux que prévu. J'ai l'impression d'avoir un poids en moins sur la poitrine. Tout se passe bien finalement.
Cut. On voit Loki suivre du regard l'hélicoptère du SHIELD en mangeant un esquimau. Morgan lui tient la main, fascinée par tout ce remue-ménage aérien.
Je retire ce que j'ai dis. La vie est une souffrance et la mienne une torture orchestrée par le diable en personne. Même un Loki complètement livré à lui-même, sans son frère, en milieu hostile, n'aurait pas pu entrainer un tel déchainement des enfers.
Cut. Un ours qui se balade dans les allées du zoo. On entend le bruit d'un répulseur près à faire feu.
Si le balourd tente de s'approcher de Morgan… Je ne réponds plus de rien.
Zoom sur l'ours qui relève le museau, renifle l'air et part gaiement dans la direction opposée, direction un stand de crêpes.
Je ne vais pas survivre à cette surveillance. J'ai l'impression d'être déjà mort trois fois. Et ma fille qui tient la main de l'alien alors que c'est moi qui devrait être à ses côtés…
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« Tony qu'est-ce que tu fais là ? On est attendu pour la réunion. »
Le concerné fut sorti brusquement de ses lamentations et tourna la tête, découvrant Natasha qui semblait s'être téléportée à ses côtés sur le toit.
« Comment tu es arrivée ici ?
- J'ai pris l'escalier », expliqua l'espionne en désignant la porte de la cage d'escalier qu'elle avait enfoncée.
Tony regarda la pauvre porte qui tenait à peine sur ses gonds.
« Je vois ça, murmura-t-il.
- Clint était censé te prévenir mais apparemment tu as décollé en laissant derrière toi des, je cite, cadavres de métal qu'il faudrait faire brûler en enfer, fin de citation. »
Tony cligna des yeux, essayant de comprendre à quoi faisait référence les cadavres. Il n'avait aucun cada… Il leva légèrement les sourcils en réalisant qu'il devait vraiment commencer à ranger ses affaires.
« Oh.
- On peut y aller maintenant ? »
Tony regarda nerveusement en contrebas.
« Et si jamais il se passait quelque chose de pire que ça et que je n'étais pas là pour empêcher que ça dérape ?
- Pire que quoi ?
- Pire que la présence du SHIELD dans un zoo, par exemple ? Pire qu'une intervention de SWAT sur un ours polaire en liberté, par exemple ?
- Dans mes souvenirs les zoos étaient moins excitants que ça.
- J'oubliais avec qui je parlais, » soupira Tony en baissant la tête, abattu par le flegme de Natasha.
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Tony eut beaucoup de mal à s'endormir cette nuit là.
Et quand il trouva enfin le sommeil, ce ne fut pas de tout repos.
Il fit sa troisième crise cardiaque de la journée pendant un cauchemar. Sa fille face à des milliers, non des milliards de serpents en liberté. Des serpents verts qui récitaient des préceptes asgardiens et portaient des casques à cornes dorés.
Quatrième crise cardiaque, qui eut lieu rapidement après la troisième. Un ours lâché aux pieds de sa fille qui tenait en main un pot de miel géant. Un ours armé de dagues et drapé dans une cape verdoyante.
Tony se réveilla en sueur, une main plaquée sur son réacteur arc. Il enchainait les rêves absurdes. Le milliardaire se pencha vers sa table de chevet et attrapa la tablette qui y était posée. Il activa la caméra dans la chambre de sa fille et la regarda un instant, profondément endormie. Elle allait parfaitement bien. Avec un soupir de soulagement il retomba sur son matelas.
« Cet alien me tuera… »
Quelques minutes plus tard, incapable de se rendormir, il se leva et alla dans la chambre de sa fille. Il s'assit sur un fauteuil, la couvant du regard, et s'endormit enfin.
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Loki serpenta un peu sur le tapis et siffla, sa langue chatouillant le nez de Morgan qui éclata de rire. Tony regarda la scène, consterné. Déjà, il n'avait pas l'habitude de voir Loki utiliser ses pouvoirs de métamorphoses. Ensuite, il n'était pas habitué à laisser sa fille entre les mains d'un serpent... Littéralement. Et pour finir il avait encore des flashs cauchemardesques de la nuit passée, qui rappelons le, étaient tous causés par Loki et non par son imagination débordante.
Tony soupira lourdement. Il devait rester positif. Positif… Au moins c'était le seul problème à gérer aujourd'hui.
« Oh mon dieu ! On n'a plus de cornichons !
- Clint je pense qu'il y a largement pire comme problème dans la vie.
- Mais Natasha, poursuivit l'archer, des larmes dans la voix. Comment je fais pour créer le sandwich ultime sans cornichon ?
- Tu t'es lancé dans une quête ultime ? demanda Thor en saisissant la moitié des mots de la phrase pendant qu'il entrait dans la pièce. C'est très noble de ta part.
- Pff, tu parles d'une quête, » pouffa Natasha en indiquant le pot de cornichons vide dans la main de son collège.
Le propriétaire du pot le serra jalousement dans ses bras.
« Vous verrez qu'un jour vous regretterez votre désinvolture face au désastre du siècle ! »
Tony se frotta pensivement le menton en occultant la suite de la discussion animée. Il avait beau y mettre du sien, parfois, il avait du mal à rester positif.
« Tonton Loki ! » s'exclama Morgan devant le Jotun ayant repris forme humaine.
Son cri empli de joie enfonça au passage une lame acérée dans le cœur de son père.
Adieu positivité, pensa Tony avant de s'effondrer.
« Bah qu'est-ce qu'il fait lui ? Je sais que c'est terrible de ne plus avoir de cornichons mais il faut savoir rester digne quand même.
- Clint je t'assure que si tu prononces encore une fois le mot « cornichon » tu vas souffrir, promit froidement Natasha.
- Courage mon ami, sourit Thor en passant un bras sur les épaules de Clint. Certaines quêtes t'amènent à risquer ta vie mais t'assurent une mort honorable et une place au Valhalla !
- Je veux pas mourir moi, murmura le concerné d'une petite voix. Je voulais juste un sandwich. »