-Vie de merde, jura Julien. Comment est-ce arrivé ?
-Je n’aurais jamais pensé qu’ils nous retrouveraient, soupira Miyu. Je crains le pire.
-Les affaires de famille sont vraiment compliquées, commenta Steve.
Si Julien et Miyu étaient dans cet état, c’était parce que leurs parents étaient aux portes de la base Rocket. Le pire, c’était que ce n’était pas les seuls. D’autres parents étaient également présents et réclamaient le retour de leurs enfants. La raison ? Ils avaient fugué pour rejoindre la Team Rocket. Apparemment, toutes ces recrues étaient d’anciens enfants stars. Visiblement leur vie étoilée ne leur convenait pas pour qu’ils quittent leur famille pour la Team Rocket.
Mathio n’avait pas perdu de temps et fit bloquer les accès à ces gueulards. Ce n’était qu’une solution temporaire mais au moins, la confrontation entre parents et enfants était retardée. La vérité, Mathio avait connaissance du passé de ces subordonnés. Sur le coup, il pensait calmer les choses avec les règles de son organisation mais il déchanta vite avec le comportement bordé de ces parents qui n’étaient pas motivés par l’amour de leurs enfants. Sentant que l’affaire allait prendre de l’ampleur, il contacta Dianthéa qui était actrice en dehors de son statut de Maitre de Ligue pour lui demander conseil.
-Je vois, dit-elle lorsqu’elle entendit toute l’histoire. Vous vous êtes mis dans de beaux draps.
-Je sais, soupira le dresseur masqué. Seulement, je refuse de remettre mes sbires à leurs parents. Un, ils sont membres de la Team Rocket et m’ont prouvé leur loyauté. Deux, je me sentirais mal si je les renvoyais dans un enfer qu’ils ont essayé de fuir. Trois, ces gens ne sont pas de vrais parents.
-Comment ça ?
-Ce que j’essaie de dire, expliqua Mathio, c’est que ces personnes qui se prétendent être des parents n’ont aucun amour pour leurs enfants. Ils ne voient qu’en eux que des revenus d’argent importants.
Dianthéa ouvrit grand les yeux. Elle peinait à croire ce que disait Mathio. Néanmoins, en bonne personne qu’elle était, elle voulut connaitre le fond de sa pensée.
-C’est difficile à croire, avoua-t-elle. Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?
-Prenons les choses d’un autre angle. Pensez-vous qu’ils aient choisi d’eux-mêmes la voie du show business ?
-Je serais tentée de dire oui mais vous allez me dire le contraire.
-Et c’est malheureusement le cas, confirma Mathio. D’après mes renseignements, ils ont fait leurs débuts avant même d’avoir dix ans.
-Dix ans, s’écria Dianthéa surprise. Comment est-ce possible ?! A cet âge-là, on n’a pas la maturité pour s’engager dans ce monde.
-C’est pour cela que je pense qu’ils ne l’ont pas fait de leur plein gré. C’est leurs parents qui les ont obligés à le faire. Abuser de leur autorité parentale, peut-on appeler ça des parents ?
Dianthéa ne trouvait pas les mots devant ces révélations. Sa vocation était son choix. Elle avait commencé à jouer sur la scène étant petite lors de spectacles scolaires devant les parents. Ayant aimé ça, elle s’était mise au théâtre. Son talent la fit remarquer par un manager intègre qui fit d’elle la star qu’on connaissait aujourd’hui. Quant à sa famille, elle l’avait toujours soutenue et encouragée. Un bon environnement malgré le revers de la médaille.
-Mais pourquoi faire ça à leurs enfants, demanda-t-elle.
-Deux raisons majeures, dit Mathio. La première et la plus évidente, l’argent. Les stars gagnent énormément d’argent. Comme leurs enfants sont encore mineurs, cela leur donne tous les droits de contrôler cet argent. La seconde, que je considère comme ridicule, c’est de voir leurs rêves personnels se réaliser en leurs enfants. Puisqu’ils n’ont pas pu le faire, ils utilisent leurs gosses dans ce but.
-Mais comment peut-on en arriver à exploiter ses propres enfants ?! A leur âge, une telle chose ne se serait produite.
-Le monde change, philosopha Mathio, et les nouvelles technologies peuvent facilement faire ressortir nos mauvais côtés. En particulier, les réseaux sociaux et Internet.
-Vous n’avez pas une bonne opinion sur le sujet, observa Dianthéa.
-Malheureusement, je suis pessimiste là-dessus. Les gens sont si narcissiques qu’ils sont prêts à tout pour être connus. Ce comportement existe depuis la nuit des temps et certains penseurs des temps anciens l’ont remarqué. Seulement, les gens se font de plus en plus voyeurs et deviennent friands de la vie privée d’autrui. Certains n’hésitent pas à commettre des actes ignobles et immoraux pour avoir leur petit moment de gloire et les médias contribuent à ce phénomène.
Malheureusement, c’était un fait avéré. Avec la télé-réalité, n’importe qui pouvait devenir une star alors qu’il n’avait aucun talent pour attirer l’attention autre que sa débilité. Du temps de Dianthéa, c’était des gens avec du talent qui pouvaient prétendre être des stars. Aujourd’hui, les choses avaient bien changé.
-Pour en revenir à nos parents indignes, ils détruisent l’enfance de leurs enfants sans le moindre remord. C’est une période importante pour l’enfant. Elle permet de se définir une personnalité mais ça va devenir encore plus difficile aujourd’hui.
-Je ne vais pas dire le contraire, approuva Dianthéa. Mais est-ce si horrible que ça pour un enfant star ?
-De base, un enfant n’a pas pleinement conscient du monde, dit Mathio. Des adultes peuvent facilement les manipuler et c’est pire avec leurs parents. Entre la drogue, les mauvaises fréquentations, la gloire trop vite arrivée, la famille et surtout la pression, ça ne peut que mal finir. C’est pour ces raisons qu’il y a eu ces fuites de stars. Forcément, le meilleur endroit où échapper à l’influence néfaste des parents, ils sont venus frapper à ma porte. Et je n’ai pas encore parlé des traces de maltraitances sur mes sbires.
Dianthéa réfléchissait à toute cette conversation. Elle commençait à mieux comprendre Mathio. Il voyait la célébrité comme quelque chose de nocif. Il tenait le coup car il était assez fort mentalement mais ce n’était pas le cas pour tout le monde. Rien d’étonnant à ce que des célébrités tournent mal. La gloire avait des effets néfastes sur eux et c’était encore pire pour des gens inexpérimentés comme les enfants.
-Je comprends, dit-elle. Je ferais tout mon possible pour vous aider.
-Ravi de l’entendre. Si vous permettez, je vais chasser ces bons à rien.
Malgré cet échec, les parents des anciennes stars n’avaient pas abandonné. Ils firent beaucoup de bruits en alertant les médias. Autant dire que les journaux se firent plaisir sur cette affaire. Toutefois, ils gardèrent une certaine retenue pour garder un semblant d’impartialité. Evidemment, Mathio avait anticipé cela et fit inviter des journalistes. Bien qu’il ne les aime pas, il devait le faire. Autrement, la population prendrait le parti de ces parents indignes et fera pression sur la Team Rocket.
-Je n’aurais jamais cru que le Général nous inviterait dans sa base, jubila Alexia.
-C’est surtout que cette histoire est en train de prendre une ampleur démesurée, dit Violette, sa sœur et championne d’arène.
PAN ! Un coup de feu retentit. Paniquées, les deux journalistes coururent vers l’origine du bruit pour découvrir Mathio armé d’un flingue. Face à lui, un homme probablement mort mais l’absence de sang semblait contredire cette hypothèse. Autour des deux, des sbires Rocket.
-Que s’est-il passé, demanda Violette.
-Un abruti pensait me soutirer de l’argent en faisant chanter la Team Rocket avec des photos compromettantes, expliqua Mathio. Je lui ai donné ma réponse.
-Vous l’avez tué ?
-J’ai tiré à côté. Il s’est pissé dessus quand j’ai approché mon arme bien près de sa sale face.
Les deux journalistes se figèrent de terreur. Le Général était une menace sérieuse envers quiconque tenterait de nuire à son organisation. De l’autre côté, céder au maitre chanteur serait le pire scénario. Peu importait combien on les payait, ils comprenaient le pouvoir qu’ils avaient sur leurs victimes et dépouillaient ces dernières de tous leurs biens avant de mettre leur menace à exécution. La philosophie de Mathio contre ce genre de personnes était simple : l’éliminer.
-Débarrassez-moi de ce type, ordonna Mathio. Jetez-le dehors et prenez-lui son portable.
Si Mathio tenait tant à ce portable, c’était pour les preuves qui se trouvaient dedans. Comme il s’y attendait, il y avait des dizaines de photos montrant de jeunes idoles dans des situations qui provoqueraient de violents scandales.
-Tenez, dit Mathio en passant le portable aux journalistes, ça illustrera votre article.
-Vous n’êtes pas sérieux ?! Ce sont vos sbires !
-Floutez, répondit Mathio. Vous faites bien ça, non ? Allez, suivez-moi.
Mathio mena ses invitées vers ses sbires. A leur vue, ils tendirent comme des arcs. Les journalistes n’avaient jamais dans leur cœur. Devant eux, il fallait toujours être présentable et aimable. Au moindre incident, ils se déchainaient sur eux pour mieux vendre leurs articles. En un mot, c’était les journalistes qui pouvaient décider de leur destin d’artiste.
-Je sais que vous n’aimez pas les journalistes. Moi non, je ne les aime pas. Seulement, la situation ne nous permet pas ce caprice. A l’heure où je vous parle, vos parents mettent tout en œuvre pour vous reprendre. Vous savez ce qui se passera s’ils réussissent et je pense que tout le monde ne veut pas ça. Alors, vous mettez cette haine de côté et vous allez tout raconter à ces deux journalistes. Vous choisissez mais le plus vous serez nombreux à parler, le mieux ce sera. Exécution !
-Général, vous n’êtes pas obligés de les faire parler, intervint Alexia.
-Il le faut. Sinon, ils resteront prisonniers de leur passé et ils ont besoin d’aide. Le monde doit savoir le vrai visage du show business.