Bonsoir.
Un nouveau problème est apparu dernièrement : il était devenu impossible d'accéder aux pages dont le lien contient un espace.
J'en ai trouvé la raison dans une obscure discussion sur un forum perdu dans le net.
Il se trouve que la dernière mise à jour dud serveur (le logiciel, pas la machine) a intégré un changement au niveau de la sécurité (???).
Il faut maintenant ajouter un drapeau supplémentaire pour que ces liens ne soient plus rejetés.
Ça m'a pris du temps et pas mal de redémarrages (désolé pour ça) avant de trouver et de modifier les fichiers de confoguration des sites.
En principe j'ai tout modifié, mais n'hésitez pas à m'envoyer un message privé si vous en trouvez d'autres.
Merci.
Les enfants élus | Auteur: Feldspath | Vue: 470 |
[Publiée le: 2022-12-12] [Mise à Jour: 2023-03-20] | ||
G Signaler | Général/Action-Aventure/Heroic Fantasy/De cape et d'épée/Amitié | Pas de commentaire |
Cette fanfic raconte l'enfance de Link et Zelda. L'année de ses 10 ans, Link découvre qu'il a été choisi par les déesses pour sauver Hyrule de la résurrection du Fléau Ganon. Jusqu'alors simple apprenti soldat, l'enfant devient malgré lui l'objet de tous les espoirs du royaume et lutte pour se montrer à la hauteur de cette terrifiante responsabilité. Lorsqu'il fait la rencontre de la princesse Zelda, son objectif se clarifie : faire ses preuves pour se montrer digne d'affronter le destin à ses côtés. Mais conquérir l'amitié de la princesse n'est pas si simple... Les deux enfants devront affronter leurs démons et les menaces qui les guettent pour se préparer à la terrible destinée que les déesses leur ont confiée. ☀️ Un chapitre chaque lundi ! ☀️ Quelques notes avant de lire : - Contenu sensible : pas de lemon ni de lime. Avertissement : certaines scènes de combat décrivent de la violence, des blessures et des décès. - Si vous avez la gentillesse de laisser un commentaire, n'hésitez pas à être sincères : je serais ravie de connaître votre avis et je suis toujours ouverte aux critiques constructives ! - Je n'ai joué qu'à Breath of the Wild et à Twilight Princess, je ne suis pas experte du lore de la franchise The Legend of Zelda. Cette fanfiction s'appuie donc uniquement sur Breath of the Wild et sur quelques éléments du lore que j'ai lus sur internet. Mon histoire ne prend pas en compte les événements de Hyrule Warriors : l'ère du fléau. | ||
Crédits: Les personnages et l'univers appartiennent à la licence The Legend of Zelda (Nintendo) |
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Chapitre 6 : La chevalerie[4080 mots] |
Publié le: 2023-01-16 | ![]() |
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Link ouvrit les yeux, mais ses pupilles n’accueillirent qu’une épaisse obscurité ; d’instinct, il se tourna vers la fenêtre, mais aucun rayon de soleil ne filtrait par l’entrebâillement des rideaux. Tout au plus pouvait-il deviner le faible éclat bleuté de la lune. Il soupira. Plusieurs heures le séparaient probablement de l’aube.
Il enfonça à nouveau sa tête dans les larges oreillers de plumes, mais les ronflements désormais familiers qui résonnaient dans le noir ne l’aidaient guère à retrouver le sommeil. Il regretta la petite chambre qu’il partageait autrefois avec sa mère, dans le quartier des domestiques. Le dortoir des apprentis chevaliers était certes bien plus confortable, mais il ne parvenait pas à s’y sentir chez lui. Sa vieille paillasse posée au sol lui avait offert un sommeil bien plus paisible que le moelleux matelas en duvet sur lequel il passait désormais ses nuits.
Il soupira à nouveau. Il savait que ses insomnies n’étaient pas tant liées à la qualité de son lit qu’aux changements radicaux qu’avait connus sa vie en l’espace de quelques mois. Plus d’un an s’était écoulé depuis qu’il avait retiré la Lame Purificatrice de son socle, événement qui avait marqué la fin de sa petite existence de bâtard invisible et de simple apprenti soldat. Du jour au lendemain, il était devenu l’enfant le plus connu du royaume, et pas un seul hylien n’ignorait son nom. Le roi en personne l’avait présenté au peuple, du haut de la muraille réservée aux allocutions des membres de la famille royale ; il avait dû monter sur un petit escabeau pour que sa tête soit visible par-delà le rempart. Repenser à la foule qu’il pouvait voir en contrebas, et dont le souverain annonçait qu’il serait le sauveur, suffit à tordre son ventre d’angoisse. Pour la première fois, Link avait eu sous les yeux l’enjeu du combat qu’Hylia lui demandait de mener en son nom. Il ne comptait plus ses cauchemars où cette foule se noyait dans une marée de sang.
Link comprit en sentant son estomac noué qu’il ne parviendrait pas à se rendormir. Il avait passé trop de nuits à lutter contre ses anxiétés, les paupières serrées, jusqu’à la levée de l’aube ; il savait désormais que rester allongé ne lui ramènerait pas le sommeil.
Il écarta ses couvertures et descendit la petite échelle de son lit superposé. L’adolescent qui occupait le matelas sous le sien ronflait si fort que Link avait l’impression que toute la structure de bois vibrait. Ses pieds nus rencontrèrent l’épais tapis, et il se faufila sans un bruit entre les couchages du dortoir. Il trouva ses affaires dans l’obscurité, s’en saisit et rejoignit la salle d’eau pour se rincer la tête et éclaircir son esprit.
Le visage ruisselant, il prit quelques instants pour s’inspecter. Le miroir était décidément trop haut pour lui : il ne voyait son reflet qu’à partir du menton. Il approchait de ses douze ans, et il désespérait de ne pas grandir. Tout au plus pouvait-il constater que ses cheveux poussaient déraisonnablement. Il passa une main dans sa tignasse blonde qui atteignait presque ses épaules, démêlant du bout des doigts quelques nœuds tenaces. Je devrais les couper, songea-t-il. Ou au moins les attacher.
Il essuya son visage et s’habilla hâtivement. Il décida d’aller directement à la salle d'entraînement de l’école de chevalerie. Il espérait chasser un peu de l'anxiété qui habitait son ventre en se défoulant à l’épée. Il pourrait ensuite rendre visite à sa mère aux cuisines avant d’aller à l'entraînement matinal. Quittant la chambre, il parcourut le couloir et sortit sur la muraille qui surplombait la cour d’entrainement.
Persuadé d’être seul levé à cette heure avancée de la nuit, il fut très étonné d’y trouver Bathylle qui s’acharnait à l’espadon sur un mannequin démembré. La poupée d'entraînement fabriquée en sacs de toile remplis de paille vomissait son rembourrage par ses coutures explosées. La maîtresse d’armes enchaînait des mouvements complexes de parade et d’offensive. Link resta immobile en haut du rempart pour l’observer, admirant la précision de ses gestes et la puissance de sa frappe. Son arme pesait un poids conséquent et enchaîner ainsi les attaques requérait une force colossale.
Bathylle fit un pas en arrière, reprit son souffle, et dit d’une voix forte :
- Ce n’est pas très chevaleresque d’épier quelqu’un du haut d’une muraille, jeune homme.
Link frissonna et se hâta de descendre les escaliers qui menaient à la cour. Lorsqu’il fut face à Bathylle, il baissa la tête et s’excusa.
- Et que fais-tu debout à cette heure, Link ?
- Je viens m’entrainer.
- C’est bien d’être assidu, mais tu ne dois pas négliger le repos.
- Je ne trouvais pas le sommeil.
Bathylle marqua un silence. Elle essuya son front ruisselant de sueur de sa manche trempée, puis dit :
- Va chercher une épée. Nous allons faire des échanges.
Link acquiesça et alla chercher une arme dans le râtelier, ainsi qu’un bouclier léger.
De retour dans la cour, il lui fit face et leva sa garde. Bathylle, qui avait échangé son espadon de belle facture pour une simple épée en bois, se dressa face à lui. Link déglutit devant son immense silhouette soulignée par la lueur vacillante des torches. La perspective de s'entraîner seul avec la chevaleresse l’enthousiasmait autant qu’elle l'intimidait. En un an d'entraînement, il ne s’était jamais mesuré à la maîtresse d’armes. Bien qu’il ait réussi à vaincre l’intégralité des apprentis chevaliers et apprenties chevaleresses en combat singulier, il sentait qu’il n’avait jamais eu affaire à un adversaire de ce niveau.
- C’est parti, dit-elle simplement.
Contre toute attente, elle se jeta immédiatement sur Link et lui asséna un coup latéral du plat de sa lame. L’enfant ne s’attendait pas à une attaque instantanée ; il fut incapable de l’éviter, et eut tout juste le temps d’abaisser son bouclier pour parer l’attaque. Cela amortit à peine la violence du coup et il fut projeté sur le sol. Bathylle bondit sur lui et plaça la tranche de son arme sur sa gorge.
- Tu es mort. On recommence.
Link grimaça. Il ne s’était même pas échauffé. Il se leva tout de même et reprit sa position. Lorsque la maîtresse d’armes annonça le début du combat, ce fut lui qui se jeta immédiatement sur elle, l’épée brandie. Son opposante bondit en arrière lorsqu’il crut la frapper de la pointe de son arme. Emporté par son élan, il continua de courir en avant, et elle lui asséna un coup de bouclier dans le torse. Il bascula en arrière et tomba sur son séant. Elle fit un pas vers lui et posa la pointe de son épée sur son cœur.
- On recommence.
Ils enchaînèrent plusieurs échanges similaires. Link sentit une frustration brûlante s’emparer de lui lorsqu’il tomba pour la huitième fois sur le gravier et sentit la pointe de l’arme de son adversaire se poser sur un point vital. Il n’avait jamais vu Bathylle se montrer aussi impitoyable avec un élève. Les entraînements qu’elle proposait consistaient plus souvent en des échanges de coups et de parades, certes difficiles, mais expliqués pas à pas avec pédagogie ; pas en des combats brutaux où elle jouait avec l’apprenti comme avec un mannequin de paille.
Lorsqu’il se releva pour la douzième fois, il fulminait.
- Allez, Link, le nargua-t-elle. Je suis ton adversaire, pas une gente demoiselle.
Il serra les dents, affermit son emprise sur le pommeau de son épée, et se jeta aveuglément sur elle en poussant une exclamation exaspérée. Elle abaissa son boulier, para le coup avec une facilité déconcertante, et balaya les jambes de l’enfant d’un coup de tibia : il s’effondra à plat ventre sur le gravier et elle posa nonchalamment la pointe de son arme sur sa nuque.
Link se redressa sur ses coudes et frappa le sol du poing, les dents serrées.
- Qu’est-ce que tu ressens, Link ? demanda-t-elle en abaissant son épée.
Il ne répondit pas. En se redressant, il s'aperçut qu’elle s’était assise à côté de lui. Il s’agenouilla en silence. Il n’arrivait pas à déglutir la boule de frustration qu’il sentait coincée dans sa gorge.
- Tu te sens en colère ? Impuissant ? Médiocre ?
Il baissa la tête, blessé. Il ne savait pas quoi dire. Le trouvait-elle médiocre ?
- Tu as l’habitude de terrasser tous tes adversaires, continua-t-elle. Mes autres apprentis ne font pas le poids face à toi. Qu’est-ce que ça te fait de vivre ce qu’ils endurent lorsqu’ils t’affrontent ?
Link leva un regard d'incompréhension vers la maîtresse d’armes. Bathylle soupira.
- Tu es un élément exceptionnel. Un prodige tel qu’on n’en a jamais vu. La décision de ton adoubement a été prise. Dans quelques semaines, tu deviendras le chevalier le plus jeune de l’histoire d’Hyrule.
Link écarquilla les yeux. Aucun apprenti ne recevait son adoubement avant l'âge de seize ans ; il n’en avait même pas douze. Il resta muet de stupeur. Elle se pencha vers lui et posa ses mains sur ses épaules, plongeant un regard grave dans ses yeux confus :
- Reste humble, Link. Contrôle ta violence et garde toujours à l’esprit la raison pour laquelle tu te bats. N’écrase pas tes adversaires parce que tu es fort, mais parce que tu sers une cause.
Link baissa la tête pour regarder l’arme en bois qu’il tenait toujours serrée dans ses mains. En le choisissant comme élu de l’Epée des Légendes, il savait qu’Hylia avait scellé son destin : sa lame devait sauver Hyrule du retour prochain du fléau. Cependant, triompher du Mal constituait un objectif si vaste, si abstrait, si écrasant, qu’il ne parvenait pas à en faire le motif de sa rage de vaincre. Avait-il réellement mis son épée au service d’une cause, ou se contentait-il de suivre les ordres de ses supérieurs et la voie tracée pour lui par les divinités de ce monde ?
- Je ne sais pas vraiment pourquoi je me bats, avoua-t-il à voix basse.
- C’est normal. Tu es encore jeune. Hylia a été cruelle de te désigner si tôt pour servir le royaume en son nom.
Elle lui sourit avec une douceur qu’il n’imaginait pas voir un jour sur ce visage d’ordinaire inflexible.
- Je sais que tu n’as pas choisi d’être l’élu de la Lame Purificatrice. La mission qui t’incombe est bien trop lourde pour les épaules d’un seul homme, sans parler des épaules d’un enfant. Mais si tu sais pourquoi tu te bats, si tu es fier du royaume que tu sers, si tu veux sincèrement protéger les plus faibles, alors cette tâche deviendra une évidence.
Elle marqua un silence.
- Lors de ta formation de soldat, on t’a uniquement appris l’obéissance. Après tout, les soldats ont seulement besoin de savoir obéir aux ordres. Mais tu ne vas pas être un soldat. Tu vas être un chevalier. Tu ne dois pas faire preuve d’une docilité aveugle. Ta loyauté n’aura de valeur que si elle repose sur un dévouement sincère.
Elle lâcha les épaules de son apprenti et leva les yeux vers le ciel éclairci. L'aube commençait d’éclabousser les nuages de son aquarelle rose et dorée, baignant la cour de la pâle lueur du jour naissant.
- Cherche la cause ou la personne qui allume une flamme dans ton cœur, reprit-elle en reposant son regard sur son apprenti. Quelque chose, ou quelqu'un, digne d'être protégé au péril de ta vie. Si tu trouves cela, Link, ta lame sera autrement plus puissante, car ton devoir prendra tout son sens.
Link conserva un silence pensif. Dès lors que l’école militaire lui avait appris à manier l’épée, se battre devint si simple que sa vocation de guerrier lui avait paru évidente. Il n’avait jamais réfléchi à une autre raison de combattre que sa prédisposition naturelle au maniement des armes.
Cependant, un souvenir envahit sa rétine. Il se revit, un an plus tôt, souffrant et épuisé, puiser dans les dernières réserves de sa volonté pour brandir son épée en direction de la princesse. Il se rappela de son désir brûlant de se montrer digne de combattre à ses côtés. Jamais auparavant n’avait-il connu ce vibrant sentiment de déférence.
Mais il se rappela aussi de l’expression affligée qu’il avait lue sur son visage, lorsqu’elle avait détourné les yeux après lui avoir adressé un regard mortifié. Qu’avait-elle vu en lui qui avait provoqué cette peine ?
Il serra les paupières. Ses pensées ne firent qu’alimenter sa confusion. Il repensa au jour où il avait ôté la vie de quatre bokoblins et serra les dents. L’exaltation qui l’avait saisi ce jour-là le hantait encore. Il craignait la violence qu’il sentait exister en lui.
Bathylle l’observa un instant, puis elle se leva et posa la pointe de l'épée de bois sur l'épaule de son apprenti agenouillé. Link la dévisagea.
- Récite-moi le code d'honneur de la chevalerie, ordonna-t-elle.
Il réfléchit un instant.
- Le chevalier, répondit Link à voix basse, se bat au nom d’Hylia et des déesses de la Triforce, dont il honore la force, le courage et la sagesse. Il sert son royaume et la famille royale. Il respecte tous les faibles et s'en constitue le défenseur. Il ne ment pas et reste fidèle à sa parole. Il est le champion du droit et du bien contre l'injustice et le mal. Il ne fuit jamais devant l'ennemi et il… contrôle sa violence, exerce sa force avec droiture et modération.
Bathylle acquiesça :
- Jusqu'à ce que tu aies trouvé la raison de te battre, obéis simplement à ces préceptes. Mais n'oublie jamais que tu ne seras un véritable chevalier que lorsque tu auras trouvé l'objet de ta loyauté et que tu te dévoueras corps et âme à le défendre.
Elle baissa son arme et lui sourit :
- Tu seras un guerrier prodigieux, aucun doute n’est possible là-dessus. Mais il ne tient qu’à toi de devenir un formidable chevalier, et d’être digne du titre de héros. Puisse Hylia te guider sur cette voie.
***
Deux semaines plus tard, la date de son adoubement fut officiellement annoncée. Tous les couloirs du château bruissaient de murmures au sujet de la cérémonie somptueuse que le roi prévoyait de donner en l’honneur de la consécration du héros envoyé d’Hylia. Habituellement, un apprenti n’était jamais adoubé seul : il était béni par un prêtre en même temps que plusieurs camarades, sous les yeux d’un comité restreint composé des familles et de quelques militaires. Mais en l’honneur du futur héros d’Hyrule, le souverain avait décidé de faire de l’adoubement de Link un événement grandiose. L’enfant serait donc le seul apprenti consacré lors d’une cérémonie officiée par la Prêtresse Royale elle-même, sous le regard du roi, de la cour et de l’armée dans leur entièreté. Le peuple était également convié à célébrer ce jour : tandis que la haute noblesse participerait à un bal somptueux dans la salle de réception du château, les rues de la citadelle d’Hyrule deviendraient le lieu d’une grande fête populaire, garnie de buffets débordant de mets fins et de bon vin, animée de spectacles et de musique. On disait même que les petits villages reculés tels qu’Emilith, Adeya ou même Ecaraille préparaient des festivités en l’honneur de l’envoyé des déesses.
Lorsque Link entendit les rumeurs qui circulaient sur la magnificence de son futur adoubement, une nausée d’appréhension prit racine dans son ventre. Il n’avait nul désir de se trouver au centre de l’attention de la cour et du peuple tout entiers. Pour ne pas voir le château agité par l’effervescence des préparatifs, il essaya de passer ses journées à s'exercer à l’épée ou à prendre soin d’Epona aux écuries. Cependant, il fut bientôt sollicité sur ordre du roi pour aller se faire confectionner une tenue protocolaire, pour répéter les grandes étapes de la cérémonie, et même pour être initié à l’étiquette qu’il devait respecter pendant les mondanités du bal. Lorsqu’il demanda au professeur qui lui enseignait les règles de convenance s’il ne pouvait pas plutôt assister aux festivités de la citadelle, trop intimidé à l’idée de participer à un bal royal, on rit de bon cœur à sa plaisanterie.
- Votre place est auprès de la cour, pas auprès du peuple, sir Link.
Link fut estomaqué d’être appelé “sir” et cessa de poser des questions.
***
- C’est l’heure, l’appela Bathylle en entrant dans le dortoir.
Link tira sur son col pour dégager au maximum sa gorge dans laquelle l’air peinait à passer.
- Tu es nerveux ? demanda-t-elle en posant sa main calleuse sur son épaule.
Il ne répondit pas. Il lui paraissait difficile de nier son anxiété alors qu’il se savait attendu par des milliers de personnes.
Bathylle l'accompagna à travers le château déserté. Seuls quelques domestiques s’affairaient ci et là, achevant les préparatifs de la réception prévue quelques heures plus tard. Le silence des vastes couloirs, habituellement très animés à cette heure de la journée, lui paraissait irréel.
Ils sortirent du château et traversèrent la citadelle dépeuplée. En prévision des festivités, de nombreux stands et des scènes amovibles avaient été installés dans les rues abondamment décorées de fleurs et de fanions colorés. Cependant, l’absence de la population et le calme anormal donnèrent à Link l’illusion de parcourir la ville au lendemain d’un cataclysme. Si je ne parviens pas à arrêter le fléau, la citadelle ressemblera probablement à ça, ne put-il s’empêcher de penser en contemplant les rues vides. Son anxiété étendit de nouvelles racines dans son estomac.
A mesure qu’ils approchaient des remparts, la rumeur des conversations excitées de la foule croissait. Tout en marchant, la maîtresse d’armes lui rappelait les grandes étapes de la cérémonie, mais il ne l’écoutait que d’une oreille distraite, trop appliqué à se composer un visage impassible en prévision du fleuve de regards dans lequel il allait bientôt s’immerger.
Ils atteignirent finalement les vastes portes de la citadelle ouvertes sur la plaine d’Hyrule. Ce que Link vit alors lui coupa le souffle.
De la porte jusqu’au bosquet bordant l’Autel, des chevaliers de la garde royale formaient pour lui un couloir armé. Et au-delà, à perte de vue sur la plaine, une foule de milliers d’hyliennes et d’hyliens s’agglutinait pour avoir une chance d’apercevoir l’enfant envoyé par les déesses.
Bathylle pressa son épaule en signe d’encouragement et s’arrêta à la porte. Le visage figé dans une expression qu’il espérait stoïque, Link parvint à mouvoir ses jambes faiblissantes et s’engagea seul dans l’allée d’honneur. Son apparition provoqua d’abord un silence soudain dans l’assemblée. Puis ses tympans saturèrent d’un tonnerre de cris, d'acclamations, de voix qui l’appelaient. La tête haute, il serra les dents et garda son regard braqué droit devant lui. Les hyliens venus assister à son adoubement espéraient apercevoir celui que les déesses avaient envoyé pour les sauver de la réincarnation imminente du Mal. Nul ne voulait voir un enfant terrifié aux jambes vacillantes. Il assembla donc tout son courage et continua d’avancer, luttant pour conserver un visage imperturbable. Le chemin jusqu’au lieu de consécration lui sembla absurdement long.
L’Autel se trouvait à une centaine de mètres de la porte de la citadelle, bâti au milieu d’un petit bois. Des chevaliers encerclaient la ligne des arbres, empêchant le public de pénétrer la zone sacrée. Lorsque Link s’engouffra dans le bosquet, il se sentit d’abord soulagé d’échapper à l’océan des regards. Il marcha un instant seul parmi les arbres et déboucha rapidement sur une clairière. Une petite foule l’y attendait. Link reconnut les plus hauts dignitaires de la cour ainsi que les familles de grande noblesse. Le roi en personne se tenait debout au pied de l’Autel, encadré par les membres les plus hauts gradés de la garde royale et entouré par les chefs ou diplomates des peuples Zora, Goron, Rito et Gerudo.
L’édifice sacré avait la forme d’une large plateforme surélevée et circulaire ceinte par trois anneaux d’eau. Quatre pontons symétriques enjambaient les canaux pour rejoindre la plateforme de pierre. De hauts piliers s’élevaient vers le ciel. Ce lieu, baigné par les rayons de soleil qui filtraient à travers la frondaison dansante, dégageait une sérénité que la présence austère des hautes instances du royaume parasitait.
Link s’arrêta pour s’agenouiller devant le souverain. D’un geste, le monarque l’invita à se lever et à monter sur l’Autel.
Il gravit les quelques marches qui le menaient à la plateforme de pierre gravée. Zelda l’y attendait, vêtue d’une robe blanche de prêtresse sertie d’une ceinture d’or. Sa longue chevelure blonde couronnée d’une tresse tombait en cascades sur ses épaules nues. Nimbée par la douce lueur des lieux, elle semblait incarner la déesse elle-même. Leurs regards s'accrochèrent tandis que Link s’avançait sur l’Autel, soudain aveugle à tout le reste. Lorsqu’il fut à sa hauteur, Zelda lui adressa un léger hochement de tête, le visage fermé. Il posa un genou à terre et s’inclina devant elle. Un frisson parcourut tout son corps lorsqu’il sentit la paume de la princesse effleurer ses cheveux. Le silence s’abattit dans l’assemblée. On n’entendait plus que le feuillage agité par le vent.
- Héros envoyé d’Hylia, commença-t-elle d’une voix qui résonnait entre les piliers de pierre. Toi qui a été jugé digne de brandir l'Épée Sacrée et choisi par les déesses pour nous sauver du Mal et de la destruction. Reçois, de ma main, la bénédiction des déesses de la Triforce. Héberge, dans tes bras, la force de Din. Accueille, dans ton cœur, le courage de Farore. Ouvre ton jugement à la sagesse de Nayru. Laisse Hylia illuminer ta lame et t’épauler face aux forces maléfiques du fléau. Protège le Royaume de l’anéantissement, de la souffrance et du désespoir qui le guettent.
Elle marqua une pause. Le visage baissé vers le sol, Link entendit le son métallique d’une épée que l’on retire de son fourreau. Il retint son souffle lorsque Zelda posa la lame sur son épaule. A son contact, une étrange sensation explosa dans sa cage thoracique. Tournant un regard estomaqué vers son épaule, il reconnut l’acier bleuté de l'Épée des Légendes.
- Apprenti Link, reprit Zelda tandis que l’enfant contenait à grand peine les tremblements que l’appel de l’Epée provoquait dans son corps, jures-tu de te battre au nom d’Hylia et des déesses de la Triforce, dont tu honoreras la force, le courage et la sagesse ?
- Je le jure, souffla-t-il d’une voix à peine audible.
- Jures-tu de servir loyalement la famille royale et de faire passer l’intérêt de ton royaume avant ton intérêt personnel ?
- Je le jure.
- Jures-tu de toujours défendre les faibles, d’aider les nécessiteux, et de protéger le peuple du royaume que tu sers ?
- Je le jure.
- Jures-tu de ne jamais mentir et de rester fidèle à ta parole ?
- Je le jure.
- Jures-tu d’être le champion du droit et du bien contre l'injustice et le mal ?
- Je le jure.
- Jures-tu de ne jamais fuir devant l'ennemi et d’exercer ta force avec droiture et modération ?
- Je le jure.
- Par l'Épée Sacrée qui t’a été confiée par la Déesse Hylia, et par le pouvoir qui m'est conféré, je te nomme chevalier du royaume d’Hyrule, au service de sa majesté de roi Rhoam Bosphoramus Hyrule et de la famille royale.
Elle exerça une pression sur la pointe de l’épée puis l’apposa sur son autre épaule. Link leva le visage vers la prêtresse. Cette dernière posa le pouce sur son front et y traça le symbole de la triforce.
- Héros d’Hyrule, reprit-elle solennellement, ta lame est désormais au service du royaume. Reçois l'Épée Légendaire. Brandis-la pour affronter le Mal et protéger Hyrule de sa corruption. Montre-toi digne de la confiance que les déesses t’ont accordée et de l’espoir que le peuple place en toi.
Elle tendit, non sans peine, l’arme sacrée vers Link, qui leva lentement la main pour en saisir le pommeau. L’attraction que l’objet exerçait sur lui le grisait et le terrifiait. Lorsque ses doigts tremblants touchèrent la fusée de l’épée, la lame s’illumina et plusieurs exclamations stupéfiées s’élevèrent de l’assemblée. Même Zelda écarquilla les yeux devant l’acier nimbé d’une vive lueur bleue.
Link saisit fermement le pommeau. L’arme demeurait trop grande pour sa petite taille, mais il possédait désormais la force nécessaire pour la soulever sans mal. Il soulagea la princesse de son poids, se leva et brandit l’arme pour sceller son serment. L’assistance suivi d’un même mouvement l’Epée des Légendes de sa multitude d’yeux ébahis.
La princesse et le chevalier restèrent immobiles au milieu de la plateforme de l’Autel, contemplant tous deux la lame brillante. Puis Link vit Zelda poser sur lui un regard insondable.
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